Eden*, le paradis mélancolique

Vous aimez les petits oiseaux ? Les vierges, les destins tragiques et les histoires d’amour pur ? Alors parlons d’Eden* ! Originairement sorti le 18 septembre 2009, ce jeu est revenu en version anglaise tout public sur Steam, le 30 janvier 2015. La version 18+, qui est celle qui vous intéresse le plus, bande de cochons, était sortie en même temps que le jeu original sous forme de patch. Il s’agit d’un visual novel de Minori, un studio qu’on ne présente plus (Ef : A Fairy Tale of the Two pour leur titre phare).

En résumé

Dans un futur lointain, la fin de la planète Terre a été prédite il y a cent ans. Depuis, l’être humain n’a de cesse de chercher un moyen de s’envoler dans l’espace. C’est un rêve réalisable grâce aux Felixes , une race génétiquement créée et supérieurement intelligente, qui a permis d’avancer les recherches au point de concevoir des vaisseaux spatiaux autonomes pour tous les habitants de la planète bleue. Sur cette Terre en fin de vie, Ryô Haruna est un garçon sombre, taciturne, sans sentiment. Militaire depuis l’adolescence, il est muté dans une base secrète pour des raisons encore inconnues.

Mais tout cela ne semble pas déconnecté de Sion, celle qui sauva l’humanité…

Dans le fond

Le ton est donné dans le début : pas de quoi se réjouir, notre bonne vieille planète va mourir et pendant ce temps, vous allez jouer la nounou pour celle qui a permis la création de vaisseaux à la Star Trek. Allez, un petit sourire ? Haruna possède un passé sombre ; en effet, depuis que l’humanité sait que la planète va disparaître, et avant que Sion puisse sortir sa baguette magique de super intelligence, l’être humain s’est adonné à de nombreuses guerres. Malgré la solution des vaisseaux, l’Homme a réussi à rester mécontent et le terrorisme est monté en flèche pour obliger son prochain à demeurer sur une Terre condamnée. Souriez, je vous dis. Vous vous en doutez, depuis que le protagoniste se trouve dans la base secrète, il va peu à peu s’humaniser. Déjà, sa rencontre avec Elica, une maid légèrement excentrique et entièrement au service de Sion, va commencer à le chambouler et le rendre un peu plus sentimental. A partir de là, on va vous sortir la carte du « mais dans le fond, j’ai toujours été un gentil ! » pour tout excuser et lui permettre de filer, on l’espère, avec le petit génie qui a sauvé l’humanité.

Le jeu reste très vague sur la raison pour laquelle la Terre va mourir. A dire vrai, il existe un passage du jeu où Haruna pose la question à Sion, ce à quoi elle répondra « Personne ne le sait ! »., Hum, excusez-moi ? N’importe quelle explication débile aurait eu plus de crédibilité que… ça.

Sur le résumé au dos de la boîte, il s’agirait d’une masse énergétique apparue sur Mars. C’est à peu près aussi réaliste que l’existence d’Edward dans Twilight. L’éditeur a dû trouver ça tellement farfelu qu’il a préféré rendre tous les personnages ignorants dans son jeu… On n’est pas à une incohérence près, hein ! Même la sauveuse de l’humanité, la Felixe la plus intelligente de la planète, en ignore la raison ! C’est tellement plus simple !

Cependant, outre ce tout petit détail qu’est la fin du monde, le jeu se déroule sans accroc et avec douceur. La valeur du jeu tient à son côté mélancolique. Il essaie de tirer parti de son aspect prévisible pour endormir le lecteur dans une ambiance maussade et désenchantée. C’est assez paradoxal puisque, s’inscrivant dans le dramatique, il cherchera à vous tirer toutes les larmes de votre corps et insistera sur le côté émotionnel.

Le problème, c’est que l’histoire est justement bien trop évidente pour réussir à vous faire pleurer. Sauf si vous êtes un Bisounours sensible à la voix tremblotante d’une femme en sang, mais là, je ne peux rien pour vous ! La romance avance aussi très lentement, au rythme de la narration. Elle est bien évidemment sans surprise et adorable à souhait, quoiqu’un peu triste.

Quant à la narration, elle est bien écrite, légère. Même si elle est à la troisième personne, elle est principalement axée dans les pensées du héros, Haruna, et fait voir le monde à travers ses yeux et ses sentiments. Cependant, la direction artistique du jeu cherche à empêcher le joueur de s’identifier au protagoniste pour le placer en simple spectateur.

Cela se voit dans la plupart des plans où nous nous trouvons derrière le personnage, apercevant son épaule et un bout de son visage. Nous ne vivons pas les scènes, nous les admirons. Ceci explique certainement aussi la préférence d’un personnage froid et antipathique à celle d’un garçon lambda auquel tout le monde peut s’identifier.

L’auteur cherche à ce que le joueur puisse s’attacher à chaque personnage et l’apprécier à sa juste valeur. Chacun possède son rôle et son histoire, ce qui explique également leur triste nombre. La qualité est privilégiée à la quantité.

Pour notre bande de petits cochons, voici un petit aparté sur les scènes de fesses. Il s’agit donc d’un patch sorti en même temps que le jeu, qui ajoute un contenu additionnel. J’entends par là qu’il est détaché du scénario. Ce qui est assez dommage, puisqu’il ne s’agit même pas de scènes coupées mais bien de fantasmes, comme des événements passés dans un monde parallèle. Elles sont totalement déconnectées de l’histoire et volontairement incohérentes entre elles. Il s’agit, en outre, de pur fan service.

Elles sont également dotées d’assez peu d’originalité puisqu’il n’y aura que des vierges au menu, chacune proposant des scènes on ne peut plus classiques. Mais les dessins font le job et on se prend facilement au jeu. Ceci dit, alors que le jeu se veut narratif et axé sur le développement des personnages. Le fait de les avoir totalement mises de côté va complètement à l’inverse de l’intention de l’auteur puisque tout ne paraît que comme du bonus pour pervers. Que nous sommes. Ne nous mentons pas.

Son et lumières

Eden* a pour avantage de posséder une jolie palette d’artistes qui contribuent très largement à l’atmosphère du jeu. Les décors sont colorés et incroyablement délicats, travaillés, détaillés. Les personnages n’ont qu’une seule tenue mais un panel suffisamment large de poses et expressions.

Cependant, il existe un point noir et pas des moindres… Minori, vous ne savez pas dessiner des hommes, sérieusement ? On sent dans les traits des visages que les illustrateurs ne sont pas du tout intéressés par le fait de croquer des personnages masculins. Bâclés, peu recherchés, ils manquent d’originalité et de finesse. Contrairement aux femmes qui possèdent toutes des traits doux, soignés et une coloration harmonieuse, les hommes paraissent plus rudes, les traits sont plus négligés et leurs proportions moins précises.

Le petit point sympathique des illustrations est l’animation simple des yeux. C’est un détail mais cela rend les personnages plus vivants.

Concernant les musiques, elles s’inscrivent dans la volonté artistique du jeu, c’est à dire une atmosphère triste et mélancolique. La plupart sont de doucereuses pistes sonores au piano. J’ai une préférence pour les musiques liées à Elica, qui correspondent vraiment au personnage et sont particulièrement travaillées.

Le générique d’ouverture du jeu (entièrement animé ! Et passablement d’ailleurs…) est dans la moyenne du bon, rien de bien incroyable, mais il dynamise un peu la longue introduction du jeu.

Concluons !

Amoureux des petits seins, des beaux décors et de la mélancolie, voici un jeu pour vous ! Eden* s’inscrit dans un univers coloré, triste mais adorable. Il sera cependant sans surprise, mais à dire vrai, ce genre de jeu s’inscrit rarement dans le rebondissement. Dans un but relativement déprimant, il essaie plutôt d’apprendre que ce qui doit arriver arrive, et qu’il s’agit souvent de l’inévitable.

Nulle licorne ou Chuck Norris pour sauver la Terre : voici la fin d’un monde, mais le début d’une nouvelle ère.


Cet article est une republication d’un article paru dans l’édition reliée n° 15 de Mag’zine, que vous pouvez toujours aller le lire ici.



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