Mise à nu – partie II
Salut !
Après une première partie, sur le fameux sujet de « La mise à nu », qui traitait ce dernier en dessin & peinture, voyons-le désormais sous l’angle photographique. Pour cela, je vous propose de poser votre regard sur quelques photographes contemporains de nu, que je vous ai trouvé.
À la question « que représente le nu pour vous ? », cette dernière nous offre des réponses intéressantes.
« Le corps humain, que ce soit celui d’un homme ou d’une femme, est une chose incroyable à voir. C’est une œuvre à lui tout seul. »
Dean Agar
Le nu artistique se distingue du nu érotique. Mais comment cette frontière entre « pornographique » et « artistique » est-elle faite ?
Le philosophe Ruwen Ogien, actuel directeur de recherches au CNRS nous dit :
Dans la jurisprudence, une représentation sexuelle crue, explicite, n’est « pornographique » que si et seulement si elle est « dépourvue de toute valeur artistique ». Lorsqu’elle est « artistique », elle ne peut donc pas être « pornographique ». Mais qu’est-ce que l’art ? Qui en décide ? Selon quels critères ? Les juges sont-ils qualifiés pour cette tâche ? En fait, derrière toute cette construction juridique, il y a une sorte de préjugé moraliste. Une œuvre de l’esprit ne peut être de l’art si elle n’est pas de « bon goût », si elle cherche seulement à solliciter nos instincts les plus « vulgaires ». Mais elle peut être de l’art si elle a une visée « noble », « élevée », « spirituelle ».
Quand on lui demande si c’est une bonne décision ou non, il répond « Songez à Woody Allen, qui veut uniquement nous faire rire ou à George Romero, qui cherche seulement à nous faire peur. Ce ne sont pas des émotions distinguées. Pourtant personne ne souhaite censurer le cinéma comique ou les films d’horreurs parce que leur but exclusif est de susciter ces émotions de base. »
Il conclut l’entretien en disant que « à proprement parler, le corps nu, les organes génitaux, ne peuvent être dits « pornographiques » en eux-mêmes. Seule la représentation visuelle ou écrite peut l’être. Même les relations hétérosexuelles les plus osées ne peuvent pas être dites « pornographiques ». Mais il suffirait qu’elles soient filmées [ou photographiées] et diffusées pour le devenir. »
Rentrons maintenant dans le vif du sujet. Que pensent nos photographes contemporains ? Pour cela, la question suivant leur a été posée : « Qu’est-ce que la féminité pour vous ? Que pensez-vous de la femme aujourd’hui ? ». Car, oui, la photographie de nu est, à une majorité écrasante, la représentation du corps féminin.
Dean Agar dit « faire le portrait d’une femme moderne en photographie, c’est tenter de capturer la beauté, l’élégance, la confiance et l’intelligence de chaque femme ». Peter Janhans renchérit en disant qu’il aime simplement les courbes du corps féminin.
Quant aux intéressées, Hélène Dourliand affirme « à mes yeux, la féminité c’est une femme bien dans sa tête et surtout dans son corps, qui assume le pouvoir qu’elle peut avoir sur son entourage. Je pense qu’à force de vouloir être l’égale de l’homme, la femme d’aujourd’hui se perd. »
Ce qui est certain en tout cas, c’est que le corps féminin représente un idéal, une beauté et une pureté sans égal. Là-dessus, tout le monde s’accorde. La photographie de nu « artistique » se distinguerait-elle donc en cela de la photographie « pornographique » ? Si l’on reprend les propos de Ruwen Ogien, la photographie « artistique » ici, d’après nos photographes, ne cherche pas seulement à révéler nos instinct les plus primaires, mais également à émouvoir et provoquer d’autres émotions plus « développées ». La photographie de nu est également une vitrine, qui montre, simplement, la fragilité & la force de la femme, son intelligence.
D’ailleurs, Wollodja Jentsch a confié : « Pour moi, le plus érotique chez une femme est son intelligence, c’est peut-être là aussi que j’y trouve sa féminité ».
Stefano Miserini va plus loin : « La féminité pour moi, c’est l’élégance de l’âme. Une attitude, un geste ou un simple regard peuvent véhiculer beaucoup plus de féminité que l’aspect extérieur ». Sur ce point-ci, ils sont rejoints par Rando Tomson qui affirme également : « une femme féminine, pour moi, est une femme qui sait ce qu’elle est, qui se sent bien dans son corps, qui est confiante. Cela n’a rien à voir avec les mensurations idéales. […] Selon moi, la féminité n’est pas le fruit d’un acharnement pour paraître femme. Cela vient de l’intérieur, c’est être naturel […] ».
Tous s’accordent sur le fait qu’une photographie « réussie », c’est une photographie qui transmet l’émotion, qui émeut et « qui n’a pas besoin de vingt lignes de légende pour être comprise ».
Pour conclure, je vais vous dire une chose essentielle ; ce n’est pas l’appareil qui fait une bonne photographie, mais la personne qui le manipule. Faire une photographie, c’est réussir à capter ce qui nous entoure, à avoir un certain regard, une certaine culture. Une bonne photographie doit avoir de l’impact sur votre spectateur, lui provoquer des émotions, lui raconter une histoire !
Voilà, ce dossier en deux parties concernant la mise à nu touche désormais à sa fin. J’espère que j’ai réussi à ouvrir un peu votre esprit et à faire évoluer votre regard sur la chose. Que vous vous poserez des questions, les bonnes questions, et, qu’à l’avenir, vous appréhenderez mieux ce concept.
Sur ce, je vous fais la bise.
Article publié sous le pseudonyme Sangigi Fuchsia.
Cet article est une republication d’un article paru dans l’édition reliée n° 8 de Mag’zine, que vous pouvez toujours aller le lire ici.