La saga Dragon Age

Si vous avez la fibre fantasy en vous, il est fort probable que vous ayez entendu parler de la saga Dragon Age et pour cause, début septembre on annonçait un dernier DLC pour Inquisition le troisième volet de cette série. Bioware, fier petit studio également papa de la célèbre trilogie Mass Effect, a ce petit quelque chose qui rend ses jeux assez sympathiques à jouer. Maintenant, on va gentiment s’installer et expliquer pourquoi cette série n’a pas l’air de s’essouffler avec le temps en vous racontant un peu l’histoire.

Dragon Age est une trilogie, le principe des jeux est relativement simple et tient sur un ticket de métro : sauver le monde de la menace du mal. Avec trois volets on peut se douter que l’univers et les menaces sont assez travaillés et variés. Allons voir ça alors !

Dragon Age Origins

C’est donc le premier jeu et nous introduit en tant que futur héros du Cinquième Enclin. Suivant vos choix de personnages vos premiers pas seront très différents. Un elfe voleur et un humain mage ne deviendront pas garde pour la même raison.

Au final vous devenez garde des ombres puis, hop, on vous annonce que le Cinquième Enclin commence et vous assistez à une bataille épique dans les plaines de Férelden, un des huit royaumes de Thédas.

Les engeances corrompent tout et gagnent inlassablement du terrain. C’est une mission pour la garde des ombres ! Et autant vous dire : vous allez bien galérer comme il faut. Au programme, de l’extermination d’engeances, de templiers, de mages et beaucoup de romances !

Vous devrez restaurer les Cercles ou libérer les mages, suivre aveuglément la religion ou affronter des templiers, coucher avec une sorcière pour sauver le monde ou mourir comme un chien errant ! Suivant vos choix, l’histoire ne se déroulera pas de la même manière et vous vous doutez que tout cela aura un impact dans les opus suivants.

Pourquoi le jeu est vraiment cool ? Parce qu’il y a un climat politique poussé, ce n’est pas juste un Seigneur des Anneaux avec un méchant contre qu’il faut s’unir. Il y a plusieurs degrés de lecture et on se rend compte qu’il y a une grande zone de gris, pas de méchant manichéen mais juste une catastrophe dont on ne sait rien et qui revient de façon cyclique.

Les compagnons font une grande part du travail pour rendre l’immersion crédible : de Alistair le prince charmant paralysé par la peur de l’avenir, Wynne la mage sage et précautionneuse, Zevran l’elfe voleur aux phrases charmeuses, Morrigan la sorcière apostate qui est plus fragile que d’apparence à Sten, Ogrhen ou même Shale. Tous ont ce quelque chose de charmant et tendre qui pousse à les écouter se chamailler à chaque balade dans les sinistres plaines du Korcari ou les champs de batailles consumés par l’Enclin.

Les choix parfois difficiles ou déjà immuables, les découvertes sur le monde qui entoure nos personnages, tout nous pousse à évoluer avec eux et à changer nos points de vue sur certains événements ou personnages clés de l’histoire.

On peut détester quelqu’un juste à cause d’un choix et réaliser qu’au final à sa place, on aurait fait la même chose. C’est ainsi qu’est narrée l’histoire d’Origins. Intelligent roman jouable où la finalité est redoutée mais pas inévitable.

Dragon Age II

Suite au Cinquième Enclin, beaucoup d’habitants de Férelden ont fui au Nord pour atteindre les Marches Libres et ses cités-états. La spécificité de cet opus vient essentiellement du fait que c’est une histoire racontée par un des compagnons du héros.

Le récit est donc très subjectif et n’est pas chronologiquement parfait puisque l’on peut omettre plusieurs années entre chaque chapitre du jeu. L’action se passe entre les murs de Kirkwall pour raconter l’événement de sa chute, du début du Cinquième Enclin jusqu’à la fin et même quelques années plus tard.

Varric est notre narrateur, un nain né sur la surface de parents exilés de leur caste à Orzammar. Il est connu pour être un romancier olé olé et raconter des histoires épiques. C’est un nain qui obtient toujours ce qu’il veut et s’attache fermement et honnêtement au héros que vous incarnez : il se décide donc à raconter l’histoire selon sa vision. Étant en huis-clos, cet opus peut paraître moins essentiel mais il est tellement révélateur du climat de Thédas, sous tension permanente entre toutes les populations.

Vraiment. L’intérêt de cet opus réside surtout dans le côté très terre à terre. Vous ne sauvez pas le monde, même pas Kirkwall. Vous luttez du mieux que vous pouvez pour que tout ne s’effondre pas et vous vous rendez compte de votre impuissance ! Juste admirer les raisons de ce massacre. La peur des templiers de voir les mages s’émanciper et devenir incontrôlables, la peur de voir les engeances prendre le dessus sur Thédas. Celle d’admettre que la société repousse les elfes par crainte de l’inconnu, l’invasion Qunari de Thédas mais surtout de voir que la religion, représentée par la Chantrie, n’est pas toute puissante et ne peut pas tout contrôler dans un monde bercé par l’illusion d’une croyance omnipotente sur terre.

Le second opus met en lumière certains faits et les exacerbe. La tension templiers et mages étant un des points pivot de l’histoire précipitant la chute de Kirkwall qui semblait déjà inévitable dès le début. Encore une fois les compagnons sont parfaitement écrits et intelligents, réels et neutres, on se retrouve à s’attacher aux personnages qui par la suite deviennent eux-mêmes en danger dans l’histoire.

L’exemple concret de cet épisode est Anders et Justice, Anders est un mage qui a fui à de nombreuses reprises les Cercles où il était envoyé pour qu’il soit surveillé, protégé et surtout pour qu’il n’utilise pas la magie du sang. Sa situation est identique à beaucoup d’autres mages mais il essaie de briser les chaînes pour que les mages soient libres, loin de la surveillance des templiers et de la Chantrie. Anders, accompagné d’un esprit de l’Immatériel, Justice, décide d’utiliser la magie du sang pour parvenir à ses fins et le choix vous revient de l’épargner, de le tuer ou même de laisser les templiers l’éliminer. A leur manière. Isabella, Sebastian, Varric, Merrill, Anders, Fenris

Chacun aura son mot à dire sur vos choix, ils le feront entendre et possiblement vous laisseront derrière choisissant leur propre chemin.

Dragon Age : Inquisition

Le dernier opus se passe encore quelques années après la fin du second titre. On a quelques engeances mais surtout on a un gros trou dans le ciel et la Chantrie n’est plus et rien ne semble pouvoir arrêter tout ça.

Encore une fois on retrouve notre ami Varric qui racontera l’histoire de l’Inquisition. L’organisation historique qui reprend du service avec une belle brochette de casse-cous.

Cette fois-ci, il y a bel et bien un méchant manichéen, là où tout semblait être une fatalité dans les précédents jeux, il y a maintenant une raison et une solution. Les engeances auraient une origine magique et le trou dans le ciel est également une conséquence.

Le monde est essentiellement dans le chaos puisque sans guide spirituel, et la discorde règne dans les plus grands royaumes de Thédas. Vous êtes le nouvel Inquisiteur par la force des choses. Vous avez vu le sanctuaire, où s’étaient regroupées les éminences de la Chantrie, être oblitéré et vous avez hérité d’une marque étrange sur votre main. Magique, elle vous permet de fermer la brèche dans le ciel mais ça ne s’arrête pas là.

Le gros trou fermé, pleins de petits orifices encore visibles mais surtout la raison de ce bazar court toujours et c’est à vous qu’il incombe de mettre les miches de ce méchant derrière les verrous.

Cet opus est plus sombre que les autres, possiblement parce que les développeurs ont trouvé amusant de mettre un ciel orageux à toutes les zones de Férelden, soit 75% du jeu… Mais surtout parce que cette fois-ci les choix ont un impact direct sur les nations.

Vous décidez si une guerre doit prendre fin, vous pariez sur vos hommes en espérant qu’ils soient capables de sauver l’impératrice. Vous êtes sans filets et vous décider de comment vous aller refaçonner le monde sous la menace d’une fin imminente où même votre survie n’est pas assurée.

La Chantrie a-t-elle toujours une place dans le nouveau monde ? Orlaïs restera toujours une superpuissance dans Thédas ou s’effondrera t-elle dans une guerre civile sans fin entre elfes et humains ? Tevinter avancera t-elle sur Thédas une fois encore reprenant ce qui était autrefois son territoire ? Les templiers doivent-ils rester esclaves de la Chantrie et se suicider les uns après les autres au nom de l’unité religieuse ?

Ces questions, vous vous les posez quand vous regardez autour de vous, si vous avancez aveuglément vous ne verrez qu’un ancien mage Tevintide qui voulait devenir un dieu et rien d’autre. Si vous faites attention, vous verrez les gardes des ombres criblés par la peur et l’horreur qu’ils inspirent en l’absence d’Enclin , que les templiers ne savent plus qui croire ou suivre se sachant condamnés et misérables, que les mages apostates préfèrent encore jeter leurs dernières forces dans une guerre suicide plutôt que de laisser une minorité dorée diriger leurs vies et également les elfes perdus entre passé lentement retrouvé et présent incertain pour eux où seule l’isolation semble être la clé de leur survie. Il y a une zone morale très floue entre chaque camps, les méchants ne le sont pas pour le plaisir et le pouvoir mais aussi parce qu’ils sont brisés. Le commandant des templiers rouges, ancien templier, a préféré rejoindre l’armée ennemie emportant des hommes avec lui, les condamnant à mort mais avec la certitude qu’ils mourront glorieusement pour une cause juste, leur liberté loin de la Chantrie.

Vos compagnons ? Ils sont la conscience de chaque camp, ils expriment verbalement ce que chacune des factions présentes ressent. Les templiers meurent comme des chiens ? Votre conseiller de guerre, ex-templier, vous montrera l’horreur que vivent ces derniers. Les mages veulent être libres ? Vous aurez les deux camps. La mage née du Cercle et en faveur de la religion, le mage apostate qui vit de lui-même loin de tout mais aussi le mage étranger à tout cela qui regarde médusé, incapable de faire un choix. Vous vous rapprocherez d’autant plus de vos compagnons qu’ils sont prêts à tout pour vous pousser au sommet sans regretter le moindre de leur choix, soyez honnêtes avec eux et ils vous épauleront. Décevez-les et ils n’hésiteront pas à vous lâcher dans l’ascension pour la victoire.

Mais qu’en est-il finalement du jeu en lui-même ?

Soyez rassurés il est aussi complet que l’histoire et l’écriture. Si vous êtes du genre hack’n’slash bien bourrin et dégueux, vous serez aux anges puisque vous avez un système de classes permettant de jouer un guerrier, un mage et un voleur et chacun avec ses spécialités. Donc bonne castagne en perspective, si vous passez en mode temps réel : ça va sentir le gros câlin groupé ! Cependant, pour les aficionados du genre stratégique, nous avons un mode nettement plus poussé en gérant le déplacement, les positions et l’ordre d’attaque de vos personnages. C’est peut-être plus long mais étrangement plus sûr question victoire. Ouais, le souci de ce genre de jeux vient bien de l’IA des personnages qui ne sont pas joués, bien que vous puissiez agir sur chacun des quatre membres de votre équipe, vous ne pouvez pas les jouer simultanément et parfois vous allez le regretter. Kingdom Hearts et Donald ? Ouais, ce genre de soucis de heal et autres joyeusetés.

Très honnêtement, Origins était parfaitement rôdé pour l’IA des ennemis, moins pour celles des compagnons et à mesure que vous avanciez dans la série, la constante semblait s’inverser.

Inquisition s’avère trop facile, la courbe d’expérience avançant bien trop rapidement comparée à la courbe de difficulté, poussant parfois le vice jusqu’à aller seul en mission au lieu d’y emmener votre groupe. L’IA des adversaires reste cependant très bonne mais pas assez pour compenser l’écart de niveaux entre personnages et environnement.

Le système de combat stratégique, en plus de sa caméra en vue plongeante ainsi que son interface complète, peut vous permettre de profiter de l’IA adverse correctement et peut également vous mettre à mal si vous débutez dans le domaine. Des combats de plusieurs dizaines de minutes peuvent vous attendre si vous êtes peu préparé ou trop consciencieux pour laisser la place à l’imprudence et la chance. Inquisition et ses dragons seront un excellent exercice dans le domaine tout comme les boss d’Origins et du deuxième volet.

En ce qui concerne les spécialisations et autres caractéristiques ? Il faut admettre qu’on est loin de Skyrim et parfois même de Mass Effect pour la personnalisation, les builds réalisables ne semblent pas très convaincants malgré les spécialités. Dans Inquisition, force est d’avouer qu’entre Sera et Varric il n’y a pas tant de différences ? En ce qui concerne Origins, c’est nettement moins problématique puisque chacun se retrouvait avec des spécialités bien trempées. Vous ne verrez pas Morrigan faire la même chose que Wynne question magie. Ouais pour Dragon Age II je ne me suis pas posée la question, peut-être son point faible mais la stratégie ne semble pas réellement nécessaire… Oups ? En ce qui concerne la création de votre héros ? Joueurs PC, soyez heureux, des mods sont là pour apporter de la diversification à outrance, fan de Mylène Farmer, votre garde des ombres pourra être rousse enflammée avec des cheveux de paille ! La joie des mods. Joueurs consoles, ne pleurez pas, Inquisition aura succombé à la mode de la personnalisation poussive des accessoires avec une mise à jour, The Black Emporium où vous pourrez colorer de rose flamboyant votre armure des flammes de l’Inquisition ou votre maillot de bain bondage/Qunari.

Maintenant si le gameplay est largement au-dessus de la moyenne mais perfectible il reste tout à fait agréable sur le long terme. Vous n’aurez aucun mal à dépasser la centaine d’heures sur chaque opus si vous approfondissez un minimum au-delà de la trame principale. L’univers assez complet est parfaitement rendu dans les décors variés des contrées visitées. Si dans Origins vous verrez énormément de neige et de forêts boueuses de Férelden, vous aurez votre lot de forêts verdoyantes, aux arbres géants, dans Inquisition et vos donjons puants et étroits dans le II. Le folklore de chaque royaume est également bien retranscrit, les accents, les coutumes, l’architecture. Tout est pensé pour être dépaysant entre Orlaïs, Rivain, Férelden ou Névarra. Cela dit en version française, malheureusement les accents disparaissent, vous n’aurez pas le plaisir de l’accent épais à la limite du slave pour Cassandra ou l’accent londonien de Dorian. Et ça c’est bien dommage. Ne pas entendre Gaspard de Chalons avec cet accent français si épais, tout Orlaïs parle français. Si c’est pas merveilleux ! Non ça l’est pas en fait.

Nous voilà donc à la croisée des mondes où l’ambiance, le fond et la forme correspondent parfaitement et retranscrivent une épopée épique et rêveuse. Dragons millénaires corrompus, mages immortels assoiffés de pouvoir, le mysticisme d’une histoire perdue qui a toujours un impact sur les vies présentes. Ce qui est assez intéressant de la part de Bioware, c’est également ce souci du détail. Si tout est bien tourné, pas parfait loin de là, mais bien ficelé il parvient à mettre un coup d’avance à beaucoup d’autres éditeurs dans le même genre. Bethesda, on parle de toi. Si The Elder Scroll joue dans une autre catégorie beaucoup moins scénarisée il reste derrière Dragon Age en ce qui concerne les problèmes sociaux.

Vous sentez l’influence de Tumblr mais Bioware inclut des personnes de couleur, des personnages homosexuels et bisexuels (voire même pansexuels), des personnes en proie à des addictions, des handicapés et tout cela avec cohérence et de façon judicieuse. Ces personnes-là ne sont pas en retrait, elles jouent un rôle important et leurs situations personnelles sont parfois le récit que des milliers de joueurs vivent actuellement.

Cela peut sembler ridicule mais s’identifier à un personnage principal donne soudainement un petit coup de main pour aller de l’avant, pour se sentir accepté et normal.

Encore une fois ça n’est pas parfait, pas forcément essentiel pour faire la qualité du jeu mais c’était un petit plus sympathique à souligner puisque depuis peu, les développeurs se rapprochent des joueurs et réalisent qu’il n’y a pas que des joueurs masculins hétérosexuels blancs de 20 ans mais tellement plus que ça. C’est peu mais ça fait du bien.

Si après ça vous n’êtes toujours pas découragés et que vous avez quelques euros à dépenser pour des jeux, n’hésitez pas à investir pour Dragon Age Origins et son DLC Awakening, ainsi queDragon Age II. En ce qui concerne Inquisition, c’est également un excellent jeu, bien qu’un peu plus cher en raison de sa date de sortie (il y a moins d’un an) et de ses DLC toujours en développement.

Bref pour la sortie du dernier DLC de Dragon Age : Inquisition, nommé The Trespasser, on se fait une petite holà pour encourager Bioware à poursuivre cette voie !

¡HOLA!

*Disponibles ici


Cet article est une republication d’un article paru dans l’édition reliée n° 14 de Mag’zine, que vous :pouvez toujours aller le lire ici.



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