Du shin sumo au catfight…

Je sais que vous aimez l’érotisme, et moi de même. Il prend de nombreuses formes : du fantasme simple à l’obsession, pour rire ou pour baver, c’est un véritable puits à connaissances salaces. Cependant, par manque d’informations, la minute Catfight se voit transformée en minute culturelle ; aujourd’hui, vous apprendrez tout sur ses origines et son ancêtre : le Shin Sumo, le sumo féminin.

Des origines peu communes

Le sumo est un sport que vous connaissez au moins de loin ; de mémoire, vous visualisez sûrement deux gros bonhommes avec un slip en corde bizarre qui se foncent l’un sur l’autre. Il tient ses origines des danses que les Japonais exécutaient pour s’attirer les faveurs des dieux lors des moissons, en implorant la pluie. Un rituel était exercé sur un fond sonore de tambours imitant le tonnerre.

On le retrouve aujourd’hui encore dans le rite exécuté par les rikishi (sportifs sumo) en frappant dans leurs mains comme lors d’une prière, ou en martelant le sol d’une jambe à une autre. Cette pratique est considérée comme extrêmement sacrée, c’est un pan culturel très important de la culture nippone. Et malheureusement, qui dit sacré dit réservé aux hommes : les femmes n’avaient pas le droit de pénétrer dans le Dohyo (le « ring » officiel en quelque sorte), pas même pour être spectatrices. Alors, pratiquer ce noble sport, même pas en rêve : impossible que des vagins ambulants puissent honorer les Dieux et la culture Japonaise, quelle évidence.

Pourtant, à l’époque d’Edo (500 ans après Jésus Christ), lOnna sumo naît par pure provocation. Dans ces années là, il s’agissait avant tout d’une parodie érotique visant à divertir un public masculin. En effet, la tenue est la même que les rikishi : une corde bien serrée, les fesses à l’air, et leur poitrine exposée, les deux femmes se lancent l’une contre l’autre et se font gémir de douleur en frottant leurs corps ; le metomi (beauté de la lutte entre femme) gagne en succès auprès des amateurs lubriques.

Cette pratique n’a cependant encore rien à voir avec le sport d’origine et se lie à la prostitution ; l’Onna sumo ne se prend pas au sérieux et s’entache d’une réputation basse, certaines joueuses allant jusqu’à se battre contre des chiens ou des aveugles pour se venger de l’interdit. Jugé comme salissant l’image du noble sport culturel nippon, cette pratique sera interdite en 1926 ; et mine de rien, ce n’est pas si vieux.

Un espoir pour l’Onna Sumo

Les traditions servent bien le machisme, mais sans les hommes et leurs merveilleux bijoux de famille, comment les honorer ? Lors de la seconde guerre mondiale, le mâle se fait rare pour des raisons évidentes. Le sumo en pâtit et perd de nombreux sportifs qui abandonnent le Dohyo pour un uniforme militaire. Dans cette situation, un retournement de situation incroyable a lieu : les quelques trop rares professionnelles de l’Onna sumo se retrouvent sur le devant de la scène, l’interdit ignoré quelques temps en autorisant la première rikishi de sexe féminin à pénétrer dans l’enceinte sacrée pour se battre.

Elle s’appelle Wakamidori Mutsunojō et est l’une des rares pratiquantes à prendre le sumo vraiment au sérieux. Cependant, elle se fera rapidement éjecter après la fin de la guerre, les matchs pouvant à nouveau être tenus par de gros mâles imposants et puissants. C’est une très triste histoire. L’Onna sumo, devenu Shin sumo l’espace d’une malheureuse guerre, replongera dans la parodie érotique et dans l’ombre, moins tabou qu’avant mais toujours ignoré.

Pourtant, les choses ne s’arrêtent pas là et le combat continue puisqu’en 2001, le Shin sumo est remis sous les lumières lors d’un débat sur les Jeux Olympiques (qui exige une équipe masculine et féminine pour reconnaître un sport). Cela ne fait donc qu’une petite dizaine d’années qu’il est reconnu au Japon…

Le sumo féminin tentera de garder ses lettres de noblesse et continue de se battre aujourd’hui encore, dans l’unique université autorisant les femmes dans son club sumo depuis l’an 2000 : l’établissement Nichidai, poursuivant les pas de Heishro Ishimiya qui serait le premier homme à avoir entraîné des femmes à but professionnel et non divertissant. La lutte ne se fait pas que sur la scène pour ces demoiselles qui cherchent à être reconnues…

Il est par ailleurs difficile de trouver des images de ces sportives ! Comme si la volonté était de les effacer, de les rendre invisibles : dans la catégorie des professionnels, on ne retrouve que les hommes, et impossible de mettre la main sur ne serait-ce qu’un portrait de rikishi féminin.

Un aparté sur ses dérivés

Je vous parlais en introduction du Catfight, et je vais vous expliquer pourquoi : le Catfight cosplay (kyatto fight) est l’un des dérivés du Onna sumo. Toujours populaire auprès des Japonais (et des sites pornographiques, sortez vos mouchoirs), deux femmes se battent en tenue de cosplay, dans un style de combat plus proche du kick-boxing que du sumo.

Difficile de trouver de véritables infos sur ce sujet : en tout cas, même déguisées en policières ou en Harley Quinn, elles n’ont pas l’air de faire semblant… Si vous cherchiez un sport alliant votre passion pour les super héros et les seins, je vous conseille d’aller faire un tour sur Youtube pour découvrir cette étonnante pratique.

De manière plus générale, de nombreuses parodies érotiques existent et sont trouvables sur le net, où les actrices tentent un réalisme raté, en se frottant les unes contre les autres, en simulant un combat difficile et douloureux, toutes habillées bien sûr. Bon, en même temps, on ne les paie pas pour leur jeu d’actrice c’est évident, mais j’ai personnellement du mal à m’émoustiller devant des phrases clichés (arrêtons les méchants !) et des bruits de cuir mouvant rajoutés par dessus la bande, paire de fesses ou non…

Dans les origines plus anciennes de l’Onna sumo, il existe aussi le sex battle , un combat de toute haleine entre un homme et une femme. Leurs sexes exposés, les deux combattants ne se font pas de cadeau et enchaînent prises douloureuses en s’insultant, pour finalement s’enlacer et faire l’amour. Je ne sais pas trop si ça se range du côté du BDSM ou de la violence gratuite… Le premier à jouir a perdu, ce qui rajoute du piment à tout ça.

Amoureux de la poésie et du metomi, bonjour ! Vous prendrez bien un peu de sake avec vue sur la verge ? A quand un shônen sur le sujet ? Non ? Bon, tant pis. Les soirées cabaret de l’époque devaient envoyer du poney, c’est moi qui vous le dit.

Le Shin sumo possède donc des origines peu nobles qui ne le desservent pas ; dans un pays aussi misogyne que le Japon, les pros ont bien du mal à se faire reconnaître quand bien même elles font du beau boulot et honorent très bien ce sport, d’un point de vue théorique en tout cas. L’histoire de leur sport est riche et bien plus noble qu’il ne le laisserait paraître.


Cet article est une republication d’un article paru dans l’édition reliée n° 12 de Mag’zine, que vous :pouvez toujours aller le lire ici.



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Ancienne membre de l'association.

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