Denki-Gai no Honya-san ; Amours d’otakus

Si je vous dis otaku, quelle image vous vient à l’esprit ? Si le terme a été largement déformé avec les années et son utilisation en France pour désigner les fans de manga et d’animation, l’image globale qui persiste est celle de personnes passant la plupart de leur temps chez elles, à se goinfrer de cette passion. Au Japon, ils sont souvent perçus comme des mauvais éléments de la société (chômeurs ou obsédés sexuels). Autant dire que niveau relations sociales, ce n’est pas au mieux et que cette passion est souvent cachée aux yeux de tous.

Mais ça, c’est ce que l’on peut voir dans la plupart des animes et mangas (Oreimo et Watamote par exemple). La réalité est quant à elle bien plus nuancée, il suffit de voir le comiket qui a accueilli 550.000 visiteurs à son édition d’hiver 2016. Cette image de l’otaku reclus est davantage un stéréotype usé qu’une vérité avérée, mais trop de séries semblent encore s’en servir. Certaines, mais pas toutes, à l’image de Genshiken ou encore de Denki-gai no Honya-san, dont il est justement question aujourd’hui !

Une série pour otaku sur les otakus

Adapté du manga du même nom, Denki-gai no Honya-san est un anime de 12 épisodes de 23 minutes et fut diffusé du 2 octobre 2014 au 18 décembre de la même année. Il est produit par le studio Shin-Ei Animation, à qui l’on doit notamment l’excellente comédie Tonari no Seki-kun. En dehors de ces deux animes, le studio produit essentiellement des séries familiales avec du Crayon Shin-chan ou du Doraemon.

Autant dire que réaliser une série comme Denki-gai no Honya-san est une expérience relativement inhabituelle pour le studio. C’est Masafumi Sato qui réalise la série, un animateur qui fut à de nombreuses reprises episode ou assistant director. À noter également qu’il a réalisé le storyboard du premier et dernier épisode, mais surtout des génériques, ce qui est assez peu commun pour être souligné. Autre point à relever dans le staff avec la présence de Yurie Kuniyuki au character design et la direction de l’animation, poste qu’il occupa également sur le format court Komori-san Can’t Decline.

Au niveau des seiyuu, on retiendra surtout la présence de Yoshitsugu Matsuoka (Bell dans Danmachi, Souma Yukihira dans Food Wars) et de Satomi Sato (Chiya Ujimatsu dans Gochiusa, Wendy Marvell dans Fairy Tail). Enfin, la série est disponible chez nous sur la plate-forme de streaming Crunchyroll.

L’œuvre originale est donc un manga écrit et dessiné par Asato Mizu, qui a déjà à son actif bon nombre de séries, souvent courtes (un seul volume). Il a également dessiné bon nombre de doujinshi, ces mangas amateurs, avec son cercle Milmake Orange. Il a également participé à l’anthologie du manga K-on!.

Actuellement, il travaille sur le manga Aharen-san wa Hakarenai qu’il a commencé en début d’année, mais il termine également Denki-gai no Honya-san dont le chapitre final devrait être publié en novembre prochain. Le manga devrait donc compter 15 volumes au total.

Il était une fois une boutique manga…

Et au niveau de l’histoire, qu’est-ce que cela raconte donc ? Et bien on nous fait suivre le quotidien d’une boutique manga, le « Umanohone » (littéralement The horse’s bone, ou L’os du cheval), qui compte sept employés, tous plutôt…uniques en leur genre. Il y a ainsi Umio (chaque employé s’appelle par un surnom), le nouvel employé qui est un fan absolu de la série de jeux « Die Heart » et de l’auteure de light novel Tsumorin ; Hiotan, ce surnom étant un jeu de mot voulant dire « pas une otaku », même si elle semble avoir une forte aspiration pour le yaoi ; Sensei, jeune employée qui aspire à devenir mangaka ; Kantoku, qui s’amuse à filmer les autres employés (et à les taquiner) ; Fu Girl, une employée de 16 ans à l’apparence d’une enfant et qui a un énorme attrait pour les zombies ; Sommelier, enfin, un grand gaillard qui ne parle quasiment pas et est extrêmement bon conseiller en manga.

Tout ce beau monde forme ainsi une équipe bien atypique, à laquelle on peut ajouter quelques personnages supplémentaires comme l’auteure Tsumorin ou Erohon G-Mon, une « contrôleuse qualité ». Leur quotidien se concentrera évidemment sur la gestion du magasin, avec des événements spéciaux ou la création de stand de recommandations pour chaque vendeur. Le tout étant ponctué par des passages divers sur leurs vies, comme Sensei qui travaille sur des doujinshis. À cela s’ajoute bien sûr une bonne dose d’humour décalée et souvent très référencée, que ce soit à des mangas/animes ou à la culture otaku en général.

Tous les gags ne seront d’ailleurs pas forcément évidents pour quiconque est étranger à cet univers.

Amourettes d’otakus

Un peu plus étonnant, ce sont les romances qui termineront d’occuper les différents épisodes. Si c’est surprenant, c’est parce que les otakus (auxquels se raccordent aisément six des sept employés de la série) sont souvent rattachés à des stéréotypes de personnes isolées et peu enclin aux relations sociales.

Et même si dans la série cela est bien le cas du personnage de Sensei, ça s’arrête là. Et alors qu’être otaku n’est pas particulièrement bien vu au Japon, Denki-gai no Honya-san nous offre là une bien belle image. On est bien loin d’un stéréotype unique et figé, les différents personnages offrant au contraire une variété de profils admirables. Et ce même à plusieurs niveaux, puisque Hiotan n’est pas une otaku en soi mais affectionne tout de même les mangas BL (boy’s love).

Peut-être une façon de montrer que l’on est un peu tous otaku, simplement à notre manière. Une passion commune qui relie les divers personnages tout le long de la série. Une belle représentation qui semble surtout témoigner l’amour qu’a l’auteur du manga original pour cette culture à laquelle il semble être très familier, vu les nombreux doujinshis qu’il a pu réaliser.

Pour revenir sur les romances, outre le fait qu’elles concernent des personnages otakus, elles sont particulièrement intéressantes pour leur traitement. Les différents couples se construisent peu à peu, avec douceur et sans précipitation. « Laissons le temps faire son office ! » décrirait assez bien la philosophie de l’anime. Les multiples amourettes ne font néanmoins pas oublier l’humour de la série, au contraire même puisqu’elles sont sujets à de nombreux gags.

Et quand cela est nécessaire, le ton se fait plus sérieux pour permettre à chaque amour d’avancer, ou non. Tout n’est pas rose ni facile pour ce qui est des relations amoureuses dans Denkigai, et c’est ce qui rend si salutaire cet aspect romance. Faire une comédie romantique est une chose, mais la faire avec des romances dignes de ce nom en est une autre.

Pour conclure

Comédie atypique, Denki-gai no Honya-san parvient à y mêler des romances sérieuses avec énormément de tendresse. C’est ce qui rend la série aussi sympathique, on ressent un réel amour de l’auteur pour ses personnages.

Avec beaucoup de bonne humeur, une dose de rêve et une avalanche de passion décomplexée, l’anime devient terriblement attachant et c’est avec douleur que l’on laisse les employés de la boutique de « L’os du cheval ». Ils aiment les mangas et vous les feront aimer. Ils s’aiment entre eux et vous les aimerez !


Cet article est une republication d’un article paru dans l’édition reliée n° 19 de Mag’zine, que vous :pouvez toujours aller le lire ici.



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Ancien membre de l'association.

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